Communiqué du 07/03/06 : Non au projet scélérat de liquidation administrative de la psychothérapie relationnelleLe dix janvier dernier, la Direction générale de la Santé, lors d’une réunion dite de "concertation", dont nous apprenons tardivement que le deuxième est devenue la seconde (i.e. la dernière), a rendu public son avant-projet de décret en Conseil d’État tel que prévu au quatrième alinéa de l’article 52 de la Loi de santé publique du 9 août 2004 portant sur le titre de psychothérapeute.
Le Snppsy rejette ce texte.
Il le considère comme une provocation, aggravant une méchante loi, prouvant que le sort de la psychothérapie relationnelle et de la psychothérapie en général ne gagne rien à se voir confié à la diligence d'une Administration depuis longtemps gangrenée par un néoscientisme patelin, obtus et rétrograde.
Le Snppsy considère qu'il faut maintenant retourner au niveau politique pour obtenir que soit traité correctement le problème de société que soulève la question de la psychothérapie dans notre pays.
Invité à produire des amendements, il informe la Direction générale de la Santé représentée par un sous-directeur, qu'il revendique une réécriture radicale de ce texte inadmissible, refusant de contribuer malgré lui à valider sa propre invalidation.
Le projet Basset aggrave les tares qui affectent irrémédiablement l’article 52. Il consacre un retour des dispositions les plus détestables de l’amendement Accoyer, comme d’établir une liste de psychothérapies officielles soi-disant "validées scientifiquement", de transformer des contraintes déjà absurdes en matière de formation en un système qui par le biais de l'usage d'un titre usurpé prévoit l'enregistrement précaire sur des listes. Il prévoit d'incorporer la psychothérapie relationnelle au code de la Santé, de médicaliser les affaires de l'âme.
Ce texte nous ignore sciemment, afin de confisquer notre nom et la réputation de l'expérience positive d'une pratique honnête et convenablement auto réglementée, au profit d'aventuriers néoscientistes partis à l'assaut de l'université.
Il ose aller jusqu'à ne mentionner nulle part l'existence même des organisations et institutions de formation de notre profession. Il réduit la formation spécifique à une discipline qu'il ignore, au sens actif du verbe, et qu'il défigure en en définissant l'accès à la seule acquisition de "connaissances" dans un cadre universitaire qu'il étrique à quatre éléments pompeusement qualifiés de "scientifiquement validés". Il rejette ce que les psychanalystes et les psychothérapeutes relationnels, de longue date, ont mis en place pour leur formation dans leurs Écoles, Sociétés et Instituts. Il méconnaît sciemment le cœur même du dispositif de formation à l’exercice de la psychothérapie relationnelle que nous avons soigneusement mis en place depuis un quart de siècle, c'est-à-dire :
• la dimension irréductiblement personnelle de la transmission de la théorie, méthodologie et clinique par le biais d'une didactique expérientielle
• la nécessité conjointe (mais insuffisante, seule) d'un lent et long travail sur soi, accompagné d'une constante supervision tout au long de l'exercice professionnel.
• l'institution de nos cinq critères et les garanties dont nous avons su entourer la bonne formation et la bonne pratique de la psychothérapie relationnelle. Il insulte les professionnels que nous sommes et avec eux il se moque de la confiance méritée dont nous jouissons de la part de ceux et celles qui recourent à nous au quotidien des difficultés de leur existence.
En réalité, il cherche à consacrer la création d’un nouveau corps de sous-psys, officiers de santé psychique, dans le cadre d'une profession de santé para médicalisée, niant l’existence de ceux qui ont fait du nom psychothérapeute quelque chose d'enviable en effet. Qu'il fasse cela sans chercher à le réaliser à notre détriment, et permette plutôt aux éducateurs, infirmiers, travailleurs sociaux, d'accéder à une véritable qualification clinique en venant l'acquérir auprès de nous.
S'agissant de l'université, dans le moment où le Conseiller du ministre nous envoie négocier des accords impossibles avec elle, il prétend lui imposer — ce qui ne s'est jamais vu [1], ses contenus programmatiques et décréter à sa place ce qui est "scientifique".
L'ensemble des professions et disciplines avec lesquelles nous partageons le Carré psy est intéressé à l'agression portée contre nous. Les psychologues, dits de droit, qui pratiquent la psychothérapie se voient contraints à en passer par la formation de "psychothérapeute" qu’il institue. Leur autonomie professionnelle (et le libre accès) remise en cause, ils se verront paramédicalisés. Ce projet administratif programme la disparition des psychologues cliniciens. Les psychanalystes seront de la fournée suivante.
Quand se réveilleront-ils ces collègues encore trop nombreux à s'aveugler, quand se dégageront-ils d'une voie qui les conduit tout droit vers un destin aussi funeste que celui qu'ils s'imaginent nous voirimposer exclusivement ? Heureusement, au sein de la Coordination psy et au-delà, de nombreux psychanalystes honorent la psychanalyse dans leur pratique quotidienne, respectent leurs collègues psychothérapeutes relationnels, et se refusent à une psychanalyse et psychothérapie d'État.
Les psychiatres professionnellement sinistrés dans notre pays, avec lesquels nous travaillons en réseau, n'ont pour leur part non plus intérêt à négliger les deux professions et disciplines œuvrant dans le cadre d'un processus approfondi de subjectivation incontournable pour eux s'ils ne veulent pas faire régresser la psychiatrie d'un bon siècle, au détriment et dam de ceux en grande souffrance qui viennent à eux, que la conjonction du DSM, de la pharmacopée et des thérapies à protocole sera impuissante à soigner.
Si l'on veut une application équilibrée de la loi 52, ce décret doit immédiatement cesser de nous être hostile. Il lui manque un second volet qui traite correctement des professions du psychisme non médicales et nous restitue notre titre, en s'inspirant mutatis mutandis du principe directeur de la loi de séparation de l'Église et de l'État (à défaut une nouvelle loi devra revenir sur notre spoliation). Que la psychothérapie relationnelle non inféodée demeure responsable de ses filières de formation et de ses procédures de titularisation. Que soit préservé en toute équité le titre de psychothérapeute relationnel attribué par nos instances représentatives, créé par le travail compétent de toute une génération qui en a fait une profession honorable, dont nous sommes légitimement fiers.
Cette seule raisonnable alternative mise en place, rien n'empêcherait alors, sur un véritable pied d'égalité, et sans obligation, des accords mutuellement avantageux avec les UER — pas uniquement de psychologie ou de médecine, mais aussi de philosophie, sociologie, anthropologie, histoire, sciences de l'éducation, etc. — qui en seraient capables, et respectueusement désireuses, conformément à nos vœux émis depuis très longtemps.
Ce n'est malheureusement pas le chemin que s'apprête à emprunter l'Administration. Qu'on y prenne garde, nous n'assisterons pas les bras croisés au scandale de la confiscation de son nom à une corporation tout entière, au travail depuis les années 60, héritière de la psychothérapie institutionnelle, de la psychologie humaniste américaine, et voisine par nature de la psychanalyse.
Le Snppsy pour commencer lance une campagne de protestation dans le monde politique. Adressons-nous de nouveau aux députés et sénateurs qui les années passées ont su se montrer attentifs à nos points de vue lors du débat parlementaire sur l’article 52.
Demandons aux élus d’intervenir en ce sens auprès du Ministre pour que cette affaire bien mal partie soit remise sur de bons rails.
Demandons-leur d'intervenir auprès de tous ceux qui ont œuvré à la loi 52. Disons-leur : allez-vous laisser une Administration sans visage inféodée à l'Inserm rayer de la carte la psychothérapie relationnelle, dont la pratique, correctement encadrée à l'instar de celle de la psychanalyse, concerne cinq millions d'électeurs ?
Le Snppsy appelle tous ses membres à se mobiliser, il agira en concertation avec la Coordination psy et tous ceux qui viendront rejoindre le combat pour une si juste cause. Il s'appuiera sur l'opinion éclairée, sur tous ceux qui dans le pays ont déjà montré qu'ils comprenaient les enjeux de société et de citoyenneté à la clé de la prétention de liquidation de la psychothérapie relationnelle et de la psychanalyse. Ensemble nous ferons savoir à nos représentants qu'il n'est pas question de laisser dans notre pays s'installer un totalitarisme administratif rampant et médicaliser le souci même de l'existence.
Ce mardi 7 février 2006, à Paris.
[1] Sauf une exception historique avec la géographie sous la Troisième république entrant en période colonialiste.
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Le 13/02/06
Observations et suggestions du SNPPsy Le SNPPsy rappelle que depuis un quart de siècle il s’est attaché à mettre en place des règles déontologiques et un dispositif garantissant une formation sérieuse et une bonne pratique de la psychothérapie relationnelle, garantie fondée sur la dimension irréductiblement personnelle de la transmission de la théorie, de la méthodologie et de la clinique par le biais d'une didactique expérientielle.
Cette mise en place s'est trouvée complétée par l'institution de cinq critères à partir desquels il titularise ses professionnels, oblige tous ses membres et se porte garant de leur exercice :
- Travail sur soi approfondi
- Formation spécifique (minimum de cinq à six années, comportant bien sûr de la psychopathologie)
- Supervision tout au long de l'exercice professionnel.
- Engagement à respecter les règles déontologiques (code émis et appliqué depuis vingt années)
- Reconnaissance par une commission de pairs.
L’avant-projet de décret constitue un déni tant des organisations, institutions de formation et professionnels que le SNPPsy réunit et représente, que de tous ceux et celles qui recourent à eux et leur font confiance, depuis des années, au quotidien des difficultés de leur existence.
Ce décret, de stricte orientation médicale et universitaire (limitée à la psychologie), n’assure aucune prise en compte des filières privées de formation et des procédures de titularisation créées par le travail compétent de toute une génération qui en a fait une profession honorable dont notre syndicat est légitimement fier.
Le point d’orgue de ce déni réside dans des dispositions transitoires inacceptables qui ne fournissent aucune des garanties traditionnelles des clauses de grand-père puisque les professionnels qui ne sont pas inscrits de droit mais exercent pourtant leur profession depuis de nombreuses années à la grande satisfaction de leurs psychothérapisants :
- ne bénéficient d’aucune inscription à titre temporaire
- sont soumis à une procédure de validation qui ne tendra au mieux qu’à leur donner la possibilité d’accéder à la formation minimale commune en psychopathologie clinique de niveau master.
Ce déni se double d’une conception de la formation spécifique à la psychothérapie qui conduit à médicaliser les affaires de l'âme en établissant une liste de psychothérapies officielles prétendument "validées scientifiquement" ce qui constitue un abus de pouvoir car il n’appartient pas à l’Administration d’interférer dans des débats épistémologiques qui relèvent des sociétés savantes et de l’Université.
Enfin l'annonce tardive que la concertation serait bouclée en deux réunions, la première consacrée à la communication par l'Administration de son avant-projet aux 27 organisations concernées, la transforme en consultation-éclair. Nous contestons le principe d'un débat conduit dans de telles conditions dans une matière aussi importante que la confiscation de son nom à une corporation toute entière, au travail depuis les années 60, héritière de la psychothérapie institutionnelle et de la psychologie humaniste américaine, sans confrontation ni négociation sérieuses.
Nous affirmons que le sort d'une discipline en sciences humaines aussi importante ne saurait relever d'une telle procédure, et alertons nos collègues psychiatres, psychologues et psychanalystes, avec lesquels nous partageons l'espace du Carré psy, du danger pour elles-mêmes à laisser de telles méthodes s'instaurer.
En l’état de ces constatations le SNPPsy ne peut que :
- rejeter l’avant-projet dans sa conception actuelle
- demander sa réécriture complète selon les principes suivants :
* que la psychothérapie non médicale, œuvrant dans la cadre du processus de subjectivation, à laquelle se rattache la psychothérapie relationnelle, soit reconnue, différenciée et demeure parallèlement responsable de ses filières de formation et de ses procédures de titularisation ;
* que (et ceci reste valable quel que soit le résultat de la réécriture), les professionnels en exercice dûment habilités et reconnus bénéficient d’une véritable clause du grand-père.
Rien n'empêcherait alors, sur un véritable pied d'égalité, et sans obligation, des accords mutuellement avantageux entre nos écoles et l'université, non réduite à la faculté de médecine et aux UER de psychologie, conformément à nos souhaits exprimés depuis très longtemps.
Cela afin que soit préservé en toute équité le titre de psychothérapeute relationnel, attribué par ses instances représentatives.